De nouveau parmi vous et de nouveau insomniaque...

... sans lien de cause à effet !

Je vous préviens je vais sûrement écrire pour ne rien dire, mais ça fait tellement longtemps et vous m'avez tellement manqué...

Ce soir de nouveau je ne parviens pas à dormir, et c'est assez étrange de retrouver ces sensations que j'ai eues pendant des années, et qui ont disparu pendant neuf mois...
Voici la nuit, mon domaine. Assis devant ce putain de clavier, que mes doigts martèlent avec frénésie, je retrouve le goût de l'insomnie de l'écrivain. Je me sens chez moi, je me confronte et ça fait du bien. Tout ce que la dépression avait occulté en moi, se déchaîne. Je m'en rends compte maintenant. Ca sent le tabac et l'inspiration, divine, orgasmique. Ce que j'ai écrit de mieux, je l'ai écrit la nuit, tard. Quand plus personne n'écoute. Quand les cris se taisent, quand la ville est comme morte, quand souvent, face à l'obscurité, l'angoisse se réveille. Je ne sais pas où sont mes anxiolytiques, ça ne m'importe qu'à moitié, même si je ne suis pas prêt de trouver le sommeil. Médicaments en tous genres, voilà mes paradis artificiels. Quand Baudelaire, au sommet de son génie, a écrit le Spleen, il ne connaissait pas le Cymbalta, ce merveilleux antidépresseur, sur la boite duquel on devrait trouver l'inscription suivante : "Cymbalta, 60mg de Bonheur dans une gélule verte et bleue."

Je divague un peu, ça fait vraiment du bien de me retrouver là, avec vous. Plus que le Cymbalta, si j'ose la comparaison... Je ne connais pas, ou peu d'intellectuels. Ceux qui m'entourent ne lisent pas ce que j'écris. Soit parce qu'ils n'aiment pas lire (cf, mon grand amour), soit parce que je refuse qu'ils le lisent (cf, mes parents), soit parce qu'ils promettent de le lire et ne le font jamais (cf mes potes, à une exception près.)

Mon monde est vraiment un monde à part, comme une collision entre My Ruin et Keny Arkana, plus toutes ces choses qui viennent de moi. Ce qui est important pour moi, je veux dire, tout ce que je créée, il n'y a qu'ici que je peux vraiment l'exprimer, et surtout, qu'ici que je suis compris. Ca soulage. Parce que malgré ce que je dis, c'est pas toujours facile d'être seul avec une sacré bande de tarés qui courent dans ma tête, vivent des cauchemars qui ne demandent qu'à être vomis sur du papier.

J'ai toujours eu peur de sortir de l'adolescence à cause de cette impression que mon imagination allait s'amenuiser, pas jusqu'à disparaître, mais presque... J'espère que ça ne sera jamais le cas. Car je suis un fainéant. Les idées, les histoires, les personnages, naissent presque d'eux mêmes, m'apparaissent presque. Et je n'ai plus qu'à écrire. Ca fait neuf mois que ça ne m'est pas arrivé. Je sais que ça va revenir, j'ai eu des périodes de pages blanches plus longues.

Je suis aussi un être profondément perturbé. Le contact social m'angoisse, les gens me font peur. En psychiatrie ça porte un nom : anxiété sociale. Deux mots que je déteste collés l'un à l'autre. M'intégrer à une équipe de travail, prendre un rendez-vous, allez à l'école, téléphoner, ou tout simplement sortir avec des potes dans un lieu que je ne connais pas et à plus forte raison si je sais que seront présents des gens que je ne connais pas m'angoisse profondément. Moins qu'avant, mais quand même. Aussi loin que je me souvienne, ça a toujours été comme ça. Rien ne viendra à bout de ça, ni les médicaments, ni les psychothérapies couteuses et jusque là inutiles malgré cinq psychiatres différents. Il n'ya que dans mon monde où je ne craigne rien. C'est pour ça que j'ai ce rapport si spécial à l'écriture, et depuis plus récemment, à la peinture... Quand je dis que le monde extérieur me fait gerber, me révolte et me fait peur, ce n'est pas une réaction d'adolescent attardé. Je m'emmerde dans mon job mais j'ai peur de tenter autre chose à cause de tout ça, car cela voudrait dire qu'il faudrait que je refasse tous les efforts que j'ai déjà déployés pour en arriver là.... Pour l'instant je ne m'en sens pas le courage. Mais ce n'est qu'un job, et le plus important n'est pas là.

Le plus important, c'est ce que je créée, car ce que je créée c'est que je suis et que si je ne créée par je n'existe pas. Freeman disait "la Terre n'est pas mon chez moi", Shurik'n : "C'est pas la fin de votre quête ni la bonne planète, ici les gens différents ça inquiète", et c'est ce que j'ai toujours ressenti. Je me suis forgé une carapace de normalité pour qu'on me foute la paix, pour l'instant ça marche... Mais ça a déjà explosé, j'ai traversé une dépression, la deuxième déjà, songé pendant de longs moments à me foutre en l'air, pour de bon, tellement je n'en pouvais plus de vivre. Jean Claude Izzo a raison, vivre fatigue. J'ai vingt deux ans et je suis déjà fatigué, pas de la vie, mais du monde extérieur par lequel je me sens agressé en continu et surtout, sans raisons.

J'ignore si c'est pareil pour vous.

J'avais vraiment besoin de vous retrouver.

J'espère que mes litanies d'ex-dépressif ne vous ont pas trop saoulé, mais il fallait que j'extériorise. Ca m'a soulagé et poignardé en même temps. A certains moments très dur, j'ai pensé à vous, je me disais que je pourrais vous demander de l'aide... Puis j'ai renoncé, me disant que j'allais pas vous imposer ça...

J'ai pris le temps de faire le tour du forum, de tout ce que j'ai raté pendant cette longue, loooooooongue période d'absence. J'ai presque tout lu. J'avais posté des trucs un peu partout mais mon pc a pas arrêté de bugger ce soir (évidemment !).

Au risque, une fois de plus de passer pour un fou, je vous aime. Je suis heureux d'être là.

Ce que ça fait du bien de taper ce mot, H E U R E U X...

Je ne suis pas malade, personne n'a jamais diagnostiqué de "dysfonctionnement" chez moi. Je crois que je peux comprendre ce que tu ressens, tout en sachant que je suis probablement à des milles en deçà de ce que tu vis. Mais... Ça n'empêche que moi aussi, je me sens inadaptée, que j'ai un mal de chien à sortir, à trouver du boulot comme tout le monde, parce que non seulement ça m'emmerde, mais que ça me fait peur, car je suis persuadée de ne réussir à rien.
Pendant très longtemps, j'ai été une fille prodigieusement timide et mal dans ma peau. Quand je marchais dans la rue, j'étais littéralement obsédée par ma gueule, ma démarche, je me sentais nulle, j'aurais voulu me piétiner moi-même. Ça m'a pris un temps fou d'en sortir. Il a fallu de la patience et du courage. J'ai dû apprendre à regarder les gens plutôt que moi. J'ai fini par comprendre qu'ils en avaient rien à foutre de ma gueule. C'est dingue, de se complaire dans le déni de soi et des autres pendant si longtemps.
Aujourd'hui, je suis quelqu'un qu'on pourrait qualifier d'équilibré. Je me suis fait des amis, presque sans l'aide de personne Je fais beaucoup la fête, beaucoup trop. Chez moi c'est pas Cymbalta, c'est alcool. Bière ou vin, trop souvent, en trop grandes quantités, toujours le soir, pour oublier qu'il y aura un lendemain, identique à la journée qui s'achève. Je passe mes journées à faire autre chose qu'écrire, parce que j'ai peur que malgré tout mon travail, ça soit toujours mauvais. Si je ne travaille pas, ça justifie l'échec, c'est bien connu
Je voudrais vivre dans une maison isolée, loin du monde, loin des gens surtout, et juste entendre le vent dans les arbres.
En même temps, j'ai envie de hurler, d'embrasser le monde, de vivre, à chaque seconde, chaque battement de cœur. J'alterne, souvent dans la même journée, les passages de morosité puis de joie. Parfois le Doute me surprend, et je me bats contre lui des heures, des jours durant. Il a de longs bras, il m'enlace et me berce, ce salopard, avec ses rangées de dents et sa silhouette massive qui occulte l'horizon.

Non, je n'ai plus tellement peur des gens, seulement de ceux que j'admire. Quand je rencontre quelqu'un dont je sens qu'il est bien, intelligent, cultivé, émotif, je gamberge, je parle trop vite en fumant des centaines de clopes, je ne dis rien d'intéressant parce que je suis terrifiée à l'idée d'avoir l'air neutre, banale, pas cultivée.
Pour le concert de Nine Inch Nails, je vais dormir chez une fille que je ne connais pas, on lit juste nos blogs respectifs, et je suis flippée parce que j'ai peur d'avoir l'air conne.

Mais je sais aussi qu'il y a tous ceux qui m'épaulent et m'écoutent, même quand ils ne comprennent pas. J'ai un homme à la maison J'ai des parents qui me filent toujours un coup de main financier, quand ils peuvent. J'ai une sœur et des amis. Je suis heureuse, en fait... Et le Doute, au fond, je l'aime bien, même si des fois, je souhaiterais qu'il aille voir ailleurs si j'y suis.

J'ai aucune idée de pourquoi je te raconte tout ça.
Si ce n'est parce que moi aussi, je suis heureuse de te revoir. Tu m'as manqué.
Et, la prochaine fois, ne pense pas un truc aussi bête que : "je vais pas leur imposer ça". D'accord, je sais pas à quoi je m'expose ; mais en fait, je m'en fous. On n'a pas toujours besoin de rencontrer les gens pour savoir qu'ils comptent. Je suis ce genre de personne, capable d'être là pour quelqu'un que j'ai jamais vu. C'est con, c'est comme ça, en amitié, je me fie toujours à mon instinct. C'est une sorte de spectre qui loge au fond de mes tripes, et quand il remue je l'écoute.
Je dis ça, j'espère quand même qu'il n'y aura pas de prochaine fois

Wahou... Quel message... J'ai été assez remuée par tout ce que tu as dit, et ça fait tellement plaisir de te lire à nouveau ! De lire tes pensées, tes états d'esprits, avec toujours cette sincérité très forte...
J'ai l'impression qu'on est une sacrée bande de bras cassés, qui vivent encore aujourd'hui le premier jour d'école (vous avez pas pleuré et crié que vous vouliez rester avec maman, vous ? )
Je suis très très touchée que tu aies pu penser à nous quand ça n'allait pas... J'ai le même avis que Kalys là-dessus, c'est parfois dur de soutenir un ami, mais c'est notre rôle, ça n'aurait pas été une corvée, une épreuve...
Sache qu'en tout cas, ici, tu auras toujours une place pour tes personnages fous, pour tes envies, pour tes idées, pour tout ce que tu veux faire partager. C'est peut-être aussi parce tu as un monde si vaste et intense en toi, que le monde extérieur te fait peur. Mais tu sais, il nous fait peur à tous, on l'avoue plus ou moins. Bon, je t'embrasse

Ca fait plaisir que vous disiez qu'on a pas besoin de rencontrer une personne pour être son ami, car c'est tout à fait ce que je ressens pour vous deux (je ne veux pas vexer les autres mais je les connais moins). Mu tu te rends compte ça fait bientot huit ans qu'on se parle par l'intermédiaire d'internet... J'avais quinze ans la première fois qu'on s'est parlé. Et voilà aujourdh'ui ! Si c'est pas trop trop bien ça !

Vos messages m'ont fait chaud au coeur. J'ai hate tout de meme qu'on se rencontre.

C'est interessant ce que tu dis Kalys, parce que pour moi c'est exactement l'inverse : j'ai un un immense complexe de supériorité ! Je suis très fier de ce que je créée, (pas toujours hein ! on est pas à l'abri de la super plantade ou juste du truc nul lol) de ce que je suis. Mais tu sais, tu es toi, tu es quelqu'un de bien, d'extrêmement interessant, de cultivé. Ceux qui nous jugent ne jugent que ce qu'ils croient voir... Autrement dit ils ne nous jugent pas nous, mais un simulacre de ce qu'ils pensent que nous sommes. ("l'intelligence, on croit toujours qu'on en a assez, vu que c'est avec ça qu'on juge. -Coluche.) Tu es toi, c'est ce qui compte. Et quand tu doutes, regarde la populasse "mcdo, tf1, fashio, grosses bagnoles". Le genre de personnes qui m'avait dit "ah ben moi quand j'arrive pas à dormir je pense aux fringues que je vais mettre le matin". Ca rassure sur ce qu'on est.

Et pour finir sur une note d'humour, comme j'ai toujours du bol, après m'être finalement endormi à 5h du matin, le voisin a décidé de faire des travaux à la perceuse à dix heures et demie... J'ai toujours du bol . je suis crevé, mais heureux ! C'est ce qui compte.

Bonsoir,
on a jamais eu l'occasion de se rencontrer, mais ce que tu as écrit m'a touché. Je crois que j'ai ressenti les choses de cette façon il y a quelques années, mais perso, j'explosais à cause d'un manque de liberté extrêmement nocif.
Je comprends ce que tu ressens, et je suis heureuse que tu n'ai pas peur de le partager avec nous.
On dira ce qu'on veux, mais pour moi et je pense que c'est un peu la même chose de ton côté (mais si je me trompe lapidez moi), l'écriture est une catharsis, même parfois, un procédé expiatoire.
Je t'encourage pour ton job qui a l'air bien pourri, en espérant te rencontrer bientôt,

Marine

Effectivement, l'écriture est une forme de catharsis pour moi. C'est pour cette raison que je trouve étrange le fait que je n'ai pas réussi à écrire pendant ma dépression... J'ai l'impression que quand j'ai déménagé à Dijon,quelque chose en moi a lâché. Je ne sais pas exactement quoi, mais j'essaie de le reconstruire. J'arrive enfin à écrire, même si ce n'est que des conneries, mais des conneries au niveau littéraire correct, ce qui est déjà ça...

Je me répète mais ça fait plaisir de se sentir compris. Comme quoi la distance et l'absence physique ne fait pas tout.